"L’empreinte écologique est un indicateur et un mode d’évaluation environnementale, qui comptabilise la pression exercée par les humains sur les ressources naturelles et les services écologiques fournis par la nature. Plus précisément, elle mesure la quantité de surface terrestre bioproductive nécessaire pour produire les biens et services que nous consommons et absorber les déchets que nous produisons.

Ouvert sur l’ensemble des problématiques contemporaines car concerné par la totalité des enjeux de nos mondes sociaux, économiques, (géo)politiques, culturels et civiques, le numérique cristallise aujourd’hui la plupart des questions liées au nouveau régime climatique. Pourtant, force est de constater que les imbrications de ce dernier avec la nature sont rarement mises en avant. La face matérielle de l’informatique se cantonne bien souvent à rester dans l’ombre des aspects innovants, disruptifs du numérique et des données qu’il produit, aide à interpréter, à résoudre, etc. L’innovation numérique, terme quasi démiurgique, s’impose à la fois comme problème et solution sans que l’on se préoccupe véritablement de la soutenabilité des terminaux informatiques, des algorithmes, des infrastructures, des datas centers, de leur consommation électrique, de celles et ceux qui les produisent, les maintiennent ou qui extraient les ressources minières nécessaires à leurs fabrications.

À ce titre, le numérique face à la crise climatique n’est pas un « sujet » parmi d’autres mais bien l’enjeu qui nous invite à réinterroger l'ensemble des manières de voir, de penser et d’agir si on souhaite, comme se propose de le faire cette revue, participer activement à un mouvement de description et de composition d’un numérique d’intérêt général.

Au sein de ce premier numéro, nous avons souhaité nous pencher sur les multiples questions que soulève l’empreinte écologique du numérique. Sans prétendre à l'exhaustivité – ce qui serait sur un tel sujet bien difficile – nous vous proposons d’explorer comment, sous le prisme de la construction d’un numérique plus ouvert, plus (en)capacitant et inclusif, la transformation numérique peut se penser de manière plus durable.

Cette exploration a comme point de départ quatre événements NEC locaux : Grand Chambéry, département du Doubs, département du Puy-de-Dôme et Lalouvesc qui ont, chacun à leur manière, abordé cette thématique en essayant d’envisager la transformation numérique sans mettre en péril l’habitabilité même de nos territoires.

Car le défi est bien celui-ci : faire évoluer les façons dont on perçoit le numérique et son fonctionnement pour être en mesure d’affronter les tumultes de l’anthropocène qui sont déjà-là.

Au fil des pages de cette nouvelle revue quadrimestrielle consacrée au numérique d’intérêt général, vous retrouverez des reportages, des éclairages, des entretiens qui explorent cette thématique qui croise écologie et numérique. Notre dossier central s’ouvre sur l’exemple d’une collectivité territoriale ayant décidé de mettre en action ce que sobriété numérique signifie. Il se poursuit sur un entretien de Nicolas Nova, anthropologue qui soutient que le progrès, en termes de futur numérique n’est pas tant une performance technique qu’une capacité à réparer. Suite à ces pages, nous analysons ensuite les multiples enjeux du concept de sobriété numérique, en nous attardant sur un exemple concret : les filières de reconditionnement informatique. Notre dossier se termine sur un éclairage sur les infrastructures numériques et une initiative d’un opérateur télécom en faveur d’un numérique plus durable.

Bonne lecture."

François Huguet, rédacteur en chef de la revue NEC

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